La Libération de Malaucène (6)

Hommage au Docteur Claude


Nous allons lire la deuxième partie de mes notes prises aux Archives départementales, mais je voudrais auparavant insister plus longuement sur la personnalité du Docteur Claude Bernard.


Il y a une paire d’années, je trainais du côté du gymnase du Buis lorsque je me souvins être venu par là, vingt ans auparavant. Deux jeunes retraitées flanaient là et je leur demandais où était la maison du Docteur Bernard. « Le Dr Claude, me dirent-elles, mais c’est là !» Ainsi cet homme sera pour longtemps encore le Docteur Claude.Tout est dit. C’est un bel hommage.


 Je lui avais demandé un rendez-vous pour compléter un article que j’avais écrit en interviewant Max Fischer. Le Dr Claude avait été le toubib des Maquis. J’étais avec mon épouse et lui aussi était en couple dans son salon. Ils nous réservèrent un accueil chaleureux, mais le Dr Claude ne me livra qu’une seule réflexion. Regardant amoureusement son épouse, il s’exprima ainsi : « Nous étions jeunes et verts. Ce sont les plus belles années de notre vie. C’est tout ce que j’ai à dire. »


Que du bonheur. Il avait publié ses souvenirs dans un petit livre titré Maquisards terroristes et il les avait complétés par un récit qui se passait dans le Ventoux nord : La grande draille. Si la famille a encore quelques exemplaires de ces deux ouvrages, nous sommes preneurs...

Que leurs enfants et petits enfants sachent combien leurs deux parents nous avaient paru beaux.


Jacques Galas, 

20 septembre 2014



Un peu plus de détails


Suite des notes sur les rapports 
des Archives départementales

Avril 1942, le préfet : Les ouvriers ont du travail mais des salaires anormalement bas, surtout si on les compare aux revenus des paysans.
En agriculture, l’organisation de la Corporation paysanne est en cours dans le Vaucluse.

27 avril 1942 : succès de la Légion à Bedoin. Les temps changeraient-ils ?

Le secrétaire général à la jeunesse demande d’interdire aux jeunes filles de travailler en short et torse nu. On signale de nombreux bals clandestins. À bannir !

Mai 1942. Sous-préfet : le retard apporté à la désignation d’une délégation spéciale à Flassan suscite des mouvements (lesquels ?).

M Jean, ex adjoint au maire de Mazan a fait pression sur Melle Boyer, directrice de l’école publique de filles pour qu’elle ne fasse pas chanter « Maréchal, nous voilà ».

Août 1942, le sous-préfet signale une recrudescence des vols dans les champs.

Du chef de la police d’Avignon aux chef des RG Marseille : « Les arrestations d’Israélites étrangers dans le département de Vaucluse n’ont pas provoqué de réactions dans le clergé et les meilleurs catholiques de mon secteur. Les bruits qui ont circulé selon lesquels les enfants juifs auraient été séparés de leurs parents ont provoqué une désapprobation générale dans ces milieux mais ce sentiment n’a pas été manifesté publiquement. Les lettres du cardinal Gerlier, archevêque de Lyon, de l’archevêque de Toulouse et de l’évêque de Montauban qui protestent avec une certaine véhémence contre les mesures prises à l’encontre des juifs étrangers n’ont pas été lues en chaire par les prêtres du diocèse d’Avignon et ne sont connues que de quelques personnalités… À l’égard du Maréchal, la position du clergé est favorable.
Suivant en cela les directives données par Mgr de Llobet, archevêque d’Avignon, les membres du clergé approuvent officiellement la politique du gouvernement et certains prêtres, au cours de leurs sermons en chaire, prononcent même des paroles en faveur du Maréchal Pétain, invitant les fidèles à suivre le chef de l’Etat. »
Horriblement clair !

D’après le recensement de juillet 1941, le nombre d’israélites domiciliés dans le département est d’environ 1500 dont 458 de nationalité étrangère. « La population aryenne (Qu’es aco ?) du Vaucluse, sans faire preuve néanmoins d’hostilité marquée vis-à-vis des décisions gouvernementales, manifeste semble-t-il une certaine compassion envers les Israélites par suite des mesures dont ils sont l’objet. »

RG Avignon, Janvier 43 : « Certains demandent la peine de mort pour les gros spéculateurs au marché noir qui est pratiqué en grand ».

Février 1943, le commissariat d’Orange note avec méfiance la création de la Milice française.

Mars 1943, le sous-préfet signale la déprime due aux départs de travailleurs vers l’Allemagne.

18 mars 1943, Carpentras, réunion d’information de la Milice française au Rex. 250 personnes présentes. Nombre jugé restreint, on espérait plus. Le chef Bonnefoy, conseiller départemental, définit les communistes comme l’ennemi n° 1. « Il est un peu prématuré pour juger de l’influence de la Milice à Carpentras ».

22 mars 1943, gendarmerie nationale : « Des tracts invitant les jeunes gens à ne pas partir pour l’Allemagne ont été affichés sur les murs à Mormoiron et Carpentras dans la nuit du 8 au 9 mars »…. 
« C’est le cœur serré et les poings aussi que les jeunes partent en Allemagne par crainte de représailles sur eux-mêmes ou sur leurs familles. On part avec l’espoir de rentrer bientôt grâce à la défaite allemande qu’on croit imminente. » Les rapports de la gendarmerie sont beaucoup moins lèche culs que ceux de certaines administrations.

« Dans le canton de Sault, la culture du blé est délaissée pour celle de la  lavande plus productive. Avant la guerre, 1 kg d’essence de lavande valait à peu près le prix d’un  quintal de blé. Actuellement le quintal de blé se paie 360 F, le kg d’essence de lavande 2250 F ».

Avril-mai 43, gendarmerie : Des tracts à tendance antinationale ont été découverts à Vaison et Malaucène courant mars.

Même source : La Légion française ne paraît pas faire preuve de beaucoup d’activité. « La milice a fait quelques actes de propagande par des inscriptions sur les murs des villes et villages qui sont plutôt nuisibles qu’utiles à l’œuvre du maréchal ».



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